
Räje
Kumm s’esch kümm
ninne
Blii noch e
bessel (ja saads)
Dräj di. Wi rund
senn dinni ärm un aue
wie glaan und rund dinni… heersch
de wend em gässel hille?
Heersch de hund drüsse em nasse
joole? S’räjt allewäj
Wedd doobliwe?
Wurum ich nix meh schriib
odder lääs? (ja? saads)
Fröj ned, luej ned uff d’
ühr, s’esch aans
Morje freej
esch fiirda (es wodd fröje)
Wänn ich der saa — (drüsse
hillt de wend nimmi)
***
La pluie
Viens il n’est que
neuf heures
Reste encore un
peu (oui elle dit)
Tourne-toi. Oh ! la rondeur
de tes bras et de tes yeux
et si petits et si ronds tes… tu entends
le vent qui pleure dans la ruelle ?
Tu entends le chien qui dehors dans l’air humide
gémit ? A coup sûr il va pleuvoir
Tu veux rester ici ?
Pourquoi je n’écris plus rien ?
ni ne lis ? (oui ? elle dit)
Ne te pose pas de questions, ne regarde pas l’
heure, il est une heure
Demain matin
c’est férié (elle voudrait la permission)
Puisque je te le dis — (dehors
le vent ne pleure plus)
Ce petit poème pris dans le recueil Aanfiirholz (1992) ne présente pas de difficulté a priori, encore que je ne sois pas sûr d’avoir rendu la volupté, si proche de la tendresse, qui lui est propre. J’aurais pu, peut-être, davantage appuyer sur la sensualité, au risque de perdre la douceur nichée dans les voyelles. Cette dernière m’a semblé primer dans l’original.
Traduire, c’est rêver, et lorsque Gaston Jung traduit les frères Matthis (important volume paru chez Arfuyen), il dit « rêver les yeux ouverts ». Je trouve cela très juste et très beau. Peut-être que lire et écrire sont alors deux manières de rêver, mais les yeux fermés.
Un grand merci à Charles Fichter, qui a saisi une modalité du texte qui m’avait initialement échappée.