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Third Stone of the Sun (Hendrix/Delville)

couvJIMIHENDRIX

Le morceau dure quelque chose comme 6 minutes 30. Il s’agit de la troisième piste de la face B de l’album Are You Experienced du Jimi Hendrix Experience. On peut l’écouter ici. C’est un paysage musical. Un désert de saturations, parcouru de rien et son contraire, au sujet duquel on a beaucoup parlé déjà. Sans parvenir à en rien dire. Profonde infirmité des mots. Au reste, que dit un morceau de musique ? Très peu à qui le comprend.

Cela nous vient de très loin, n’a pas fini de nous arriver vraiment. On murmure que Hendrix a eu accès à une technique extra-terrestre de guitare. J’ai envie d’y croire.

Les 6 minutes 30 les plus vastes peut-être du rock psychédélique — ça se discute, mais en termes quantiques alors, allons-y on a toute la nuit. Le temps déborde dans « Third Stone of the Moon », comme chez Éluard. Encore que la poésie de ce dernier soit bien loin des préoccupations profondes de ce morceau, sorte de suprême parturition qui n’en finit pas de s’auto-engendrer. Énergie lysergique s’il en est.

Dans un très bel essai qu’il consacre à Are You Experienced (Éditions Densité, 2019), Michel Delville, guitariste de son état, nous offre quelques pages tendues et précises qui mettent cet incroyable morceau en lumière, tout en en respectant l’opaque vérité. Elle prend tour à tour la forme d’une charade musicale ou d’un kaléidoscope jeté dans l’espace intergalactique, et c’est précisément ce que Delville nous raconte à propos de ce morceau, de ce trip miraculeux entre Sirius et Alpha du Centaure, où l’on croise Walt Whitman aussi bien que Johannes Kepler ou les Mânes de la SF. Et Delville de déballer soudain la collection de disques de Hendrix, pour mieux, si besoin en était, nous convaincre du vertige. Celui-ci va de Bach à Django Rheinardt, en passant par Leadbelly, Fifth Dimension des Byrds et tant d’autres. Selon toute bonne logique extra-terrestre, Delville perçoit une clef de « Third Stone » dans la suite des Planètes de Gustav Holst. Et pourquoi pas? C’est même une hypothèse ufologiquement incontestable, bien que l’on puisse risquer nombre d’autres pistes intersidérales encore. Cette étude de Are You Experienced fourmille d’ailleurs d’interprétations tout aussi stimulantes et rêveuses au sujet de la musique de Hendrix.

Delville signait déjà un OK Computer (2016) dans cette collection « discogonie » aux Éditions Densité. Discogonie propose de « considérer qu’un vinyle, ce trou noir qui opère trente-trois révolutions par minutes sur une platine, est le récit sonore du commencement d’un monde propre au groupe de musiciens qui l’a gravé, dont le big-bang serait l’impact du tout premier son, et dont les sept jours de la Création seraient ramassés sur quarante-cinq minutes environ ». À quoi on ajoutera que les petites Discogonies sont des ouvrages à la maquette admirablement réalisée.

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